La peste de ce pays
Ce week-end, mon chéri nous avait un peu tanné, nos copains du week-end et moi, pour qu'on aille tous ensemble assister à un match de foot de l'une des deux équipes de Rome, l'AS Roma. En général, l'ambiance y est plutôt bon enfant, les familles assistent aux matchs, il y a beaucoup de filles dans les tribunes, pas du tout la même ambiance que quand j'étais allée avec lui au stade à Paris (j'ai d'ailleurs juré de ne plus y mettre les pieds...). Bref, on a cédé ;-)
Alors que nous étions sur le chemin du stade hier soir, dans le bus, appel d'un de nos nouveaux copains, grand amateur de foot et d'histoire médiévale (cherchez l'erreur ;-) : le match a été annulé, après la mort le matin même d'un jeune supporter de l'autre équipe de Rome, assassiné par un flic, dans une sombre histoire bizarroïde de police qui tire sur une voiture à une aire d'autoroute (on s'étonnera après du peu de confiance des italiens dans leur police... à force de voir de telles bavures, on peut comprendre...).
A peine avons-nous cette nouvelle que nous descendons de notre bus, qui s'avère être (malheureusement) déjà arrivé à destination... Là, de l'autre côté de la rue, des masses de jeunes, dont je commence à distinguer, de loin, dans la nuit, l'attirail pas très rassurant : casques de motos, bouteilles, bâtons ou barres à la main... Les voilà qui se dirigent vers l'entrée du stade où une pauvre malheureuse voiture de flics attend je ne sais quoi. Prudents, nous reculons et commençons à battre en retraite sur le pont qui nous ramène à l'autre rive du Tibre, visiblement plus calme... Quelques groupes de jeunes arrivent face à nous en courant sur le pont, on ne se démonte pas et on continue notre retraite quand on commence à entendre des bruits de pierres, des cris, qu'on voit des éclats de lueurs, des fumées, la voiture de police qui s'en va à toute vitesse... On n'a pas fait long feu, j'ai regretté d'avoir mis ce soir-là des chaussures dont la semelle était super glissante (il avait plu dans la soirée...) mais on a réussi à fuire dignement !
Une demie-heure de marche, un apéro roboratif et une glace au kiwi plus tard... nous voilà de retour à la maison pour essayer de comprendre ce qui s'est passé : en gros, nous sommes arrivés pile au moment du début de l'attaque du stade et d'un commissariat proche par des supporters. Aucun dispositif policier n'avait été prévu, alors qu'une caserne de flics avait pourtant été attaquée juste avant (dans le quartier que nous avons tranquillement traversé sur le chemin du retour, d'ailleurs, glups...). Bref, une fois de plus, la désorganisation des forces de l'ordre, la folie violente de jeunes complètement paumés et fanatiques de foot, a mis le feu aux poudres.
Maintenant, on va avoir droit aux sempiternels débats, aux obsèques nationales pour le jeune mort le matin dans un incident qui n'avait rien à voir avec ce qui s'est passé ensuite, aux discours creux et pleins de bonnes intentions des politiques... Mais ce pays continuera de crever des mêmes maux dont il souffre depuis des années : le désoeuvrement et le désespoir de ses jeunes, qui retrouvent une attache dans la société à travers l'"identité" des clubs de foot, un Etat absent ou désorganisé, une police mal formée et mal dirigée, trop prompte à sortir les armes, une tolérance pour le fanatisme "footballistique" à tous les niveaux de la société...
Ca m'a fait un peu penser à nos émeutes de banlieues d'il y a deux ans, le feu prend super vite, la violence est extrème, le prétexte triste à pleurer...
Ce n'est pas demain la veille que je retournerai au stade... Surtout que maintenant, il faut que je me fasse rembourser les billets...