Irréel

Irréelle cette soirée d'hier... Les résultats annoncés sur le portable de mon chéri à 18h30 alors qu'on arrivait à la Maison de l'Amérique latine, l'ambiance dehors faite d'espoir, tous ces jeunes qui chantent et agitent leurs drapeaux. Et puis l'ambiance dedans, tout le monde est au courant et les mines sont grises... Irréelle Marianne*James qui passe avec un verre de jus d'orange, Emmanuelle*Béart tristounette qui traîne dans le fond du jardin, les voix sont basses, la télé braille, tout le monde erre, portable à la main, pour annoncer la défaite à ses proches... Irréelle cette image qui s'affiche à 20h sur les écrans, alors que pourtant, on sait depuis une heure et demie... Irréelle Ségolène qui s'avance à 20h15 devant nous après son discours officiel et nous parle, sourire aux lèvres, nous promet une belle fête de remerciements dans 15 jours, comme si elle s'adressait à chacun d'entre nous, comme si elle était la seule à savoir garder la tête haute, à avoir le moral, à y croire encore et toujours, à se projeter dans l'avenir alors que moi, je me sens les deux pieds englués dans la glaise du présent. Irréelle cette boule qui se forme dans ma gorge, ces larmes qui me montent au coin des yeux alors qu'elle parle et que je me dis que c'est la fin de l'aventure, qu'on va en baver maintenant, qu'on est seuls, si décalés par rapport au reste de ce pays... Irréelle la sortie de Ségolène, chacun qui se dirige lentement vers le buffet et les petits fours, et puis les conversations qui s'animent, les gens qui s'égaillent dans les magnifiques salons lambrissés de cet hôtel particulier, mon chéri qui serre des paluches et qui me regarde de loin d'un air paumé... Irréel le retour de Ségolène, son regard qui croise le mien, je suis à deux pas d'elle, j'ai envie de pleurer, je me retiens et je fais un brave sourire comme à quelqu'un dont on sait qu'il est très malade mais pour qui on veut avoir l'air de rester fort... Irréel ce moment où, vers 22h, on sort de ce magnifique bâtiment, on descend quelques marches, notre copain O me tape dans le dos, je souris, je lève les yeux et là, des centaines de paires d'yeux qui nous regardent derrière les grilles, les caméras, les lumières à fond, un silence de mort... Irréel le silence dans Paris que l'on traverse à pied pour rentrer chez nous, les échos lointains de "leur" fête de ringards à la Concorde. Irréel les images à la télé ensuite, les "le Président Sarkozy" de PPDA sur TF1, l'impression de regarder un mauvais film sur une clique clinquante et vulgaire qui aurait conquis le pouvoir dans un pays en mal de démocratie...

Irréel le réveil ce matin... Et mon éclat de rire en écoutant la chronique de Guy Carlier sur Inter, une de ses toutes meilleures depuis bien longtemps... Je n'y arrive pas, je suis encore dans le déni, je n'arrive pas à me dire que c'est fini, terminé, qu'il va faire ce qu'il a dit, que je vais vivre dans un pays qui a un Ministère de l'immigration et de l'identité nationale... et que c'est ce qu'a voulu pour moi la majorité de mes compatriotes.

Comments

[capucine]

Mon premier réflexe quand j'ai su ça (j'éatis en vacances à Bali), c'était de me dire que les français étaient des C----. Comment peut-on partager les idées aussi basses et viles d'un type pareil ? Bref, un grand dégoût et aussi se dire qu'il va falloir supporter sa tête pendant 5 ans dans les media. Et pusi de la peur aussi ...

[Sara]

Et oui... irréel, mais vrai... malheureusement :-(

[Pauline]

C'est vrai que devoir se taper Marianne James et la Beart dans la même soirée, c'est hard ... Je te taquine, hein !

[mariaba]

Et pour sourire, parce que tu sais que je suis d'accord, irréel ton pain d'épices !!!;-)))

[Sarah]

Même incompréhension de mon côté ! :-(
Les gens autour de nous se plaignent des radars, des flics qui en font trop, du manque d'infirmières, d'instits et que font-ils le dimanche ? Ils votent pour que cela continue !!!!